À nos humanités révoltées – Kiyémis
À nos humanités révoltées - Kiyémis | Édition : Métagraphes
Femme noire, territoire.
Réglementé, déchiffré, étudié,
Femme noire, territoire.
Femme noire, territoire
Convoité, exproprié, enchaîné,
Femme noire, territoire.
Je vous ai parlé du premier livre qui m’a initié à la poésie contemporaine. Voici le 2e, « À nos humanités révoltées » de Kiyemis, que j’ai récemment relu. Si le titre et la couverture ne vous avaient pas déjà donné une idée des thématiques abordées dans ce recueil, les citations en ouverture auront tôt fait de le faire. Petit format, mais immense puissance : un recueil de textes politiques autour de la déshumanisation de la femme noire dans nos sociétés modernes mêlé à l’éloge de la puissance des mères.
Kiyémis attaque avec des mots justes et tranchants. Comme elle le dit d’elle-même, c’est une « Afropéenne qui fait du bruit ». Et ce qu’on entend à la lecture de cet ouvrage, ce n’est pas une douce mélodie chatoyante, mais une tempête sourde et hurlante à la fois. Des mots qui s’entrechoquent, s’alignent et transmettent avec conviction et authenticité son engagement en tant que femme noire afroféministe – entre autres. Des mots qui scandent, chantent dénoncent puis condamnent les injustices.
Au fur et à mesure que la lecture se fait et que le rythme des tambours s’intensifie, on entend la voix des femmes noires, d’aujourd’hui et d’autrefois rugirent à travers sa propre voix.
On voyage tour à tour entre passé ensanglanté et présent toujours teinté des couleurs de ces anciennes douleurs. Les blessures ne sont peut-être plus visibles, mais les attaques persistent, se veulent plus sournoises, et sont donc tout autant dévastatrices. Il y est aussi question d’héritage. L’auteure, moi, toutes les femmes noires ont également les pieds de chaque côté de ces terres qui se font face et dont on ne sait comment rapprocher les rives. Des territoires séparés par nos tentatives d’intégration dans une société qui ne veut pas de nous, mêlées à nos volontés de créer notre propre espace, à notre image.
Je me suis reconnue dans son approche du deuil de l’insouciance et de la naïveté en réponse à la prise de conscience de l’existence d’un racisme ayant muté, mais présent dans toutes les strates de nos sociétés. Un jour, on se réveille et on se rend compte qu’on s’est menti bien longtemps, trop longtemps. Et que fait-on de cette prise de conscience ? On se révolte, on réclame justice, on cherche sa place, on revendique son droit d’appartenance et d’existence.
Ainsi, ce recueil est une avalanche qui vous entraîne dans de multiples sujets, chers à l’auteure et qui devraient l’être à tout un chacun. Rappelez-vous l’extrait que je vous ai partagé la semaine dernière de « La prochaine fois, le feu » de James Baldwin. Être indifférents aux injustices d’un autre être humain, c’est approuvé ces injustices et les commettre à son tour. Le recueil de Kiyémis vient rejoindre l’ensemble des ouvrages indispensables, tels que Césaire, qui participent à la construction et à l’apaisement de nos crises identitaires.
À nos humanités révoltées – Kiyémis
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